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lundi 7 juillet 2014

LA SITUATION DES ECREVISSES EN FRANCE

LA SITUATION DES ECREVISSES
EN FRANCE

RESUME

Depuis la fin du XIX" siècle, la distribution des écrevisses en France a connu de profonds
bouleversements , et l'introduction d'écrevisses allochtones en provenance essentiellement
du continent nord-américain, a irrémédiablement modifié le paysage astacologique français
et européen.
Les quatre enquêtes réalisées en France par le Conseil Supérieur de la Pêche depuis 1977, ont permis de suivre l'évolution des différentes espèces d'écrevisses recensées sur le territoire national, mettant à chaque fois en évidence la forte expansion des espèces exotiques et le recul des espèces natives.
L'enquête de 2006 n'échappe pas à celle tendance et la situation de nos trois espèces d'écrevisses doit désormais être considérée comme alarmante.
Deux de ces espèces se caractérisent par un statut de conservation proche de l'extinction (Austropotamobius torrentium et Astacus astacus) alors que la troisième, Austropotamobius pallipes est « réfugiée » sur les secteurs apicaux des bassins versants, confinée sur des zones soumises aux premières manifestations du changement climatique et isolées par les espèces exotiques qui progressent de plus en plus vers l'amont.
En effet, l'écrevisse du Pacifique (Pacifastacus leniusculus), mais aussi l'écrevisse rouge de Louisianne (Procamabrus clarkil), sont les espèces qui montrent la plus forte expansion géographique durant la période 2001-2006, partout elles apparaissent comme des concurrents redoutables, plus agressifs , résistants aux pathologies, capables de coloniser des habitats variés....
Ces deux espèces en particulier, étendent leur aire de répartition, et colonisent chaque année de nouveaux départements, de nouveaux cours d'eau, éliminant par la même, les espèces autochtones.
L'expansion des écrevisses introduites , l'arrivée récente en France d'une nouvelle espèce (Orconectes juvenilis) et les modifications de la Loi autorisant dorénavant le transport à l'état vivant des « espèces susceptibles de provoquer des déséquilibres biologiques » pourraient sceller définitivement le sort des écrevisses endémiques, si aucune mesure n'est prise rapidement par les autorités, dans le cadre d'un plan d'action national « écrevisse ».

INTRODUCTION

Les enquêtes nationales sur la répartition des écrevisses en France menées en 1977, 1988, 1995 et 2001 auprès des brigades du Conseil Supérieur de la Pêche (CSP) ont montré que l'évolution des populations d'écrevisses était très rapide, se traduisant notamment par deux tendances bien identifiées: recul et raréfaction des écrevisses endémiques, progression constante des écrevisses exotiques introduites (CHANGEUX, 2003).
Cette situation a suscité la mise en place d'une veille écologique spécifique à l'échelon national initiée par le CSP, et encadrée au niveau régional par les différentes délégations régionales de l'établissement. L'enquête menée en 2006 porte donc sur la période 20012006, elle doit en effet permettre de vérifier ces tendances et d'acquérir de nouvelles connaissances sur la situation spécifique des différentes espèces et sur leur répartition
géographique. Jusqu'en 2001, sept espèces d'écrevisses étaient identifiées en France: trois espèces autochtones, l'écrevisse à pieds blancs (Austropotamobius pal/ipes), espèce la plus largement répandue au niveau national, l'écrevisse à pattes rouges (Astaeus astaeus) dont la répartition naturelle semble couvrir l'est du pays et plus particulièrement les bassins de la Moselle et de la Meuse (LAURENT et SUSCILLON, 1962), et enfin l'écrevisse des torrents (Austropotamobius torrentium) , initialement signalée en Alsace (LEREBOULLET, 1858), longtemps considérée disparue et redécouverte dans le Nord-Est du pays dans deux départements (MACHINO, 1995; MACHINO, 1996; COLLAS, 1996, FRANCKHAUSER et MACHINO, 2001, HORNIER et al., 2001). quatre espèces introduites , avec par ordre d'apparition, l'écrevisse am érlcalne (Orconeetes limosus), originaire de la côte Est des Etats-Unis, l'écrevisse à pattes
grêles (Astaeus leptodaetylus), originaire d'Asie mineure et centrale, l'écrevisse du Pacifique ou écrevisse signal (Paeifastaeus leniuseulus) provenant de la côte ouest des Etats-Unis et l'écrevisse rouge de Louisiane (Proeambarus elarkil) quant à elle issue des bayous du Mississippi. Presque un siècle après l'introduction de la première écrevisse exotique en France, une nouvelle espèce Orconectes juvenilis (COLLAS et TAYLOR, à paraître) fait son apparition dans la faune astacicole française , découverte en 2005 dans le département du Doubs, elle est également originaire d'Amérique du Nord. Son apparition pourrait en entraîner d'autres dans un futur proche, la parution récente d'un atlas sur la répartition des différentes espèces en Europe (SOUTY-GROSSET et al., 2006) signale la présence de plusieurs écrevisses exotiques dans différentes régions d'Europe (Orconeetes virilis, Orconeetes immunis, Proeambarus sp., et Cherax destruetor, originaire
d'Australie) . Ce document présente les résultats de l'enquête 2006 et synthétise sous forme de carte de
répartition , l'ensemble des données pour les huit espèces recensées dans les différents milieux naturels aquatiques du territoire national. Enfin, il aborde sommairement les menaces qui pèsent sur les demières populations d'écrevisses indigènes.

1) METHODE

La méthodologie utilisée lors des enquêtes précédentes a été reprise en 2006. Un questionnaire d'enquête « express écrevisses », semblable à celui employé en 2001, a été diffusé par la Direction Générale du CSP à l'ensemble des délégations régionales au cours du mois de septembre. Dans chacune des délégations régionales un correspondant « écrevisses » était chargé de le diffuser auprès des brigades départementales puis de collecter et de centraliser les données avant de les transmettre au correspondant national pour exploitation. Un premier travail de vérification a été réalisé au niveau régional, cette étape a donné lieu à
de nombreux échanges entre le correspondant régional et les brigades départementales. Ces échanges se sont poursuivis entre les correspondants régionaux et le correspondant national, les cartes de répartition ont ainsi fait l'objet d'une validation dans chaque délégation régionale.
Par rapport aux enquêtes précédentes, on peut cependant observer plusieurs évolutions du questionnaire. Ainsi, et afin de préciser le statut biologique de chacune des espèces, outre la notion de présence/absence, il était demandé de préciser le nombre de sites pour chaque espèce mentionnée dans le département. La valeur devait permettre d'apprécier l'abondance de chaque espèce au niveau départemental.
D'autre part, il paraissait intéressant de recueillir des données sur les mortalités d'écrevisses en France, une rubrique supplémentaire a donc été ajoutée au questionnaire. Le questionnaire à remplir par chaque brigade (voir copie en annexe 1), porte sur l'ensemble du département sans faire intervenir de localisation plus détaillée. Chacune des cartes, présentées dans ce document, résume les informations concernant aussi bien les eaux libres (cours d'eau, lacs et retenues de 10 et 20 catégorie) que les eaux closes et les piscicultures. L'évolution à court terme a été appréciée en distinguant 3 classes : (1) disparition de population, (2) maintien des populations, (3), apparition de populations. Pour suivre l'évolution à long terme de la répartition, espèce par espèce, des cartes semblables ont été réalisées à partir des enquêtes précédentes (1977, 1990, 1995 et 2001). Les protocoles adoptés au cours des différentes enquêtes ont été suffisamment semblables pour qu'elles soient comparables entre elles. Ces indications sont utilisées dans la suite pour parler d'apparition ou de disparition, de diminution ou d'extension. Toutefois, comme c'est généralement le cas pour les informations de répartition, si la présence d'une espèce (figurée en grisé) est une donnée avérée, l'absence (figurée en blanc) est une information moins définitive car il n'est pas possible de mettre en oeuvre une prospection intégrale des milieux aquatiques.

Difficultés rencontrées:

Établir une carte de répartition nationale d'une espèce est un projet ambitieux qui se trouve confronté à différentes difficultés. Le niveau de connaissance général est très variable d'un département à l'autre, mais aussi d'une espèce à l'autre. L'information sur la localisation des espèces est souvent dispersée, aucune base de données n'existant actuellement au niveau national. La réalisation de l'enquête 2006 n'a pas échappé à ces difficultés et l'on peut globalement distinguer deux situations qui sont apparues lors de l'exploitation des réponses. S'agissant des écrevisses endémiques: les réponses au questionnaire font ressortir un niveau de connaissance que l'on peut qualifier de bon et qui se manifeste notamment par l'intérêt des agents pour ces espèces « vulnérables », selon le classement établi par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).
Cette connaissance globale de la situation départementale est généralement renforcée par des études ponctuelles destinées à proposer des mesures de gestion et de conservation (Natura 2000) ou par la réalisation d'atlas départementaux de répartition. Ces documents, souvent réalisés avec différents partenaires (Agence de l'Eau, Parcs Naturels Régionaux, Fédérations de pêche...) permettent souvent de mettre par écrit les connaissances historiques des agents de terrain.
Pour les trois espèces endémiques, les cartes de répartition publiées dans ce document font donc apparaître le nombre de sites actuellement connus dans chaque département. S'agissant des écrevisses introduites: plusieurs cas doivent être distingués. D'une manière générale la connaissance de ces espèces dans les eaux libres (au sens de la réglementation) peut également être qualifiée de bonne. Les études citées plus haut
permettent également de suivre, en parallèle , l'évolution des populations de ces espèces. Pour ces espèces et à l'exception d'Orconecfes juvenilis, les cartes publiées ne mentionnent pas le nombre de sites connus dans les départements, car les informations transmises sont généralement trop lacunaires ou imprécises sur les plans d'eau du domaine privé notamment.

Le cas des plans d'eau:

La situation se complique davantage lorsque l'enquête aborde la question des plans d'eau, plus particulièrement celle relative aux eaux closes, piscicultures et plans d'eau privés. Ces ouvrages, constituent un vecteur de dispersion des espèces introduites non négligeable, pour lesquels il est souvent difficile d'obtenir des renseignements fiables (aussi bien au niveau administratif qu'écologique). Dans certains départements leur nombre est tellement important (plusieurs milliers) qu'il est illusoire mais surtout très difficile, de vouloir connaître quelles espèces les peuplent. Cependant, s'agissant des plans d'eau du domaine public, où les agents sont amenés à intervenir régulièrement, la connaissance est satisfaisante.

La notion de sites:

Cette notion, suite aux modifications enregistrées dans la répartition des écrevisses en France, s'applique de façon satisfaisante aux espèces endémiques qui occupent généralement des linéaires de cours d'eau peu importants. En effet, les écrevisses autochtones sont aujourd'hui localisées sur des tronçons de cours d'eau facilement identifiables , à la faveur notamment des prospections nocturnes. Ainsi, plusieurs sites peuvent être observés sur un même cours d'eau ou un bassin versant. La taille d'un site n'est donc pas un critère homogène. Elle s'applique toutefois plus difficilement aux écrevisses exotiques qui sont capables de coloniser des linéaires entiers de cours d'eau. L'exemple de l'écrevisse américaine est le cas le plus fréquent, l'espèce est en effet censée occuper tous les grands axes fluviaux sur des linéaires importants. Dans ce cas, le nombre de sites sous-estime le niveau réel des populations au niveau départemental et donc au niveau national.
D'autre part certaines d'entre elles (Procambarus c/arkù) sont observées dans des milieux très variés (marais, étangs littoraux...), où la surface colonisée est parfois très importante.

2) Résultats

Parmi les indications qui ressortent de l'exploitation des questionnaires, plusieurs éléments semblent ressortir. Les brigades du Conseil Supérieur de la Pêche, montrent un intérêt réel au suivi des populations d'écrevisses. Cette tendance se vérifie notamment au travers des nombreuses études réalisées au niveau départemental, à la mise en oeuvre d'outils informatiques destinés à géo-Iocaliser les sites (base EXCEL, ACCESS... ).
D'autre part, il ressort de l'enquête réalisée en 2006 un intérêt manifeste pour deux espèces en particulier, l'écrevisse à pieds blancs (APP) et l'écrevisse du Pacifique (PFL). La première fait l'objet de recherches actives pour son intérêt en tant qu'espèce patrimoniale, la seconde est souvent découverte au profit d'études ponctuelles ou signalée par les usagers des milieux aquatiques. Ces deux espèces, bien représentées au niveau national, occupent des habitats similaires, et la recherche de sites à écrevisses à pieds blancs aboutit parfois à la découverte d'une population de P. lenisuculus ou d'Orconectes Iimosus. Les autres espèces endémiques (A. astacus, A. torrentium) , dont la répartition est plus retreinte au niveau national sont également bien suivies au niveau local. Pour les trois espèces endémiques, il a donc été possible de dresser des cartes de répartition indiquant le nombre de sites connus par département (annexes 2, 3 et 4).

2-1) Situation des espèces autochtones:

Les causes du déclin des espèces autochtones sont multiples , on peut citer l'apparition en Europe vers 1860 d'une pathologie (l'Aphanomycose ou peste des écrevisses) qui a décimé les populations à travers toute l'Europe. Cette pathologie serait apparue en France vers 1875 et aurait décimé les populations sur l'ensemble du territoire national en un peu moins d'une décennie. Partout, des mortalités massives ont été observées sans qu'aucun remède ne puisse être apporté. Cette pathologie continue de sévir aujourd'hui , comme en attestent des observations récentes.
La dégradation des milieux naturels liées aux aménagements (travaux dans le lit mineur, aménagement des bassins versants , création d'étangs...), l'altération de la qualité de l'eau (pollution) sont également à l'origine de cette tendance. En effet, les écosystèmes aquatiques intègrent toutes les conséquences des activités humaines, ils subissent de profondes perturbations et parmi les principales qui agissent sur l'habitat de l'écrevisse, on peut citer:
- La pollution des cours d'eau : L'écrevisse est très sensible à la qualité de l'eau, les pollutions ponctuelles ou chroniques (industrielles, domestiques ou agricoles) fragilisent ou détruisent les populations;
- la destruction de l'habitat : la modification de l'habitat suite à la réalisation de travaux à but hydraulique (curage, recalibrage, rectification) entraîne une uniformisation et une banalisation de tous les habitats nécessaires aux différents stades de développement de l'écrevisse. D'autre part, l'évolution des pratiques agricoles a entraîné de profondes modifications à l'échelle des bassins versants. Elles se sont traduites par une évolution de l'occupation des sols, disparition des prairies au profit de monocultures intensives
nécessitant des traitements par pesticides, des apports d'engrais ....
Cette évolution s'est généralement accompagnée de travaux d'aménagement des cours d'eau qui ont profondément et durablement modifié la structure physique de ces milieux. Réalisés à des fins hydrauliques, ces travaux ont banalisé les habitats de nombreuses rivières de plaine, détruisant par la même l'un des principaux habitats de l'écrevisse à pattes rouges.
Enfin, l'introduction d'espèces exotiques est également une cause de dégradation et de disparition des populations endémiques. Aujourd'hui, les dernières populations d'écrevisses européennes sont menacées par ces espèces qui présentent des traits biologiques plus favorables (stratégie démographique, résistance aux pathologies...).
Parmi les cinq espèces d'écrevisses introduites, quatre espèces sont issues d'Amérique du Nord: Toutes ces espèces du Nouveau monde sont porteuses saines de la peste de l'écrevisse (Aphanomyces estect; ou aphanomycose , et rentrent en compétition avec les espèces autochtones. Ainsi, en terme de compétition inter-spécifique , l'écrevisse du Pacifique doit actuellement être considérée comme la principale concurrente de l'écrevisse à pieds blancs. Les deux espèces, qui occupent des habitats similaires, entrent aujourd'hui en
compétition sur de nombreux bassins versants , avec dans la majorité des cas observés, un avantage pour l'espèce introduite. D'autre part les secteurs abandonnés par l'écrevisse à pattes rouges ou l'écrevisse à pieds
blancs ont été pour la plupart colonisés par des espèces exotiques moins exigeantes sans aucune possibilité de reconquête.

2-1-1) L'écrevisse à pieds blancs Austropotamobius pallipes (Lerebouillet, 1858)-

Ecrevisse à pieds blancs (Austropotamobius pallipes ) - femelle - photo : Marc COLLAS
Description de l'espèce :
Considérée comme un indicateur de milieu de bonne qualité, l'écrevisse à pieds blancs fait l'objet d'une attention et d'un suivi particulier de la part des brigades départementales , des efforts spécifiques de prospection ont été réalisés dans un grand nombre de départements. Autrefois largement répandue sur l'ensemble du réseau hydrographique , l'espèce est aujourd'hui, essentiellement localisée sur les zones amont des hydrosystèmes, où les populations sont isolées, sans continuum écologique.
Le preferendum écologique de cette espèce exigeante, bien que centré sur la zone à truite décrite par HUET (1949), est relativement large avec des extensions dans la zone à barbeau. Selon la typologie établie par VERNEAUX (1973), la gamme typologique de l'écrevisse à pieds blancs s'étendrait au moins du 82 au 87 (TELEOS, 2004) avec un optimum typologique pour des niveaux compris entre 83 et 85.
Situation en 2006 :
Ainsi, l'enquête permet de recenser Austropotamobius pallipes dans 76 départements sur un total de 2501 sites. Les plus fortes concentrations sont observées sur le domaine continental , plus précisément dans les régions Bourgogne, Franche-Comté Rhône-Alpes, Auvergne , mais aussi sur les domaines méditerranéen (Languedoc-Roussillon) et alpin. Il est important toutefois de pondérer ces concentrations par les efforts de prospection qui peuvent modifier le statut de l'espéce. En Bourgogne où 1400 prospections ont été réalisées depuis 1999, une relation a été mise en évidence entre le nombre de sites à écrevisses pieds blancs et le nombre total de sites prospectés (LERAT et al., 2006).
L'écrevisse à pieds blancs demeure l'espèce endémique la mieux représentée en France, même si elle est absente ou n'est plus signalée dans 20 départements. Pour huit d'entre eux l'espèce avait pourtant été mentionnée par LAURENT & SUSCILLON (1962) : Aube, Charente, Landes, Nord, Pas-de-Calais, Bas-Rhin, Seine-et-mame, Somme. Dans ces départements et malgré les efforts de prospection, elle peut déjà être considérée comme disparue ou au bord de l'extinction. En Charente-Maritime et malgré deux années de
prospection , l'espèce est considérée disparue depuis 2000. Ses populations peuvent être considérées comme « reliques» dans vingt autres, où le nombre de sites abritant des écrevisses est inférieur à dix. Dans l'Hérault, la brigade observe l'apparition de Pacifastacus leniusculus sur le dernier secteur où les pieds blancs présentent une population intéressante, dans l'Indre comme dans plusieurs autres départements elle est présente sous forme « relictuelle », la Lozère mentionne que les populations diminuent ou disparaissent totalement sur des axes importants. Dans les observations faites par les brigades , les mentions « régression généralisée des populations, effondrement des effectifs, disparition de populations... » sont souvent utilisées par les brigades pour qualifier l'état de conservation de l'écrevisse à pieds blancs.
Ces observations sont confirmées par un nombre élevé de cas de mortalités, ainsi, l'écrevisse à pieds blancs représente à elle seule 89% des cas signalés en France pendant la période 2001 /2006, 41 départements en font état avec des origines diverses : événements climatiques observés depuis 2003 et épizooties diverses (Aphanomycose et Thélohaniose) . Les brigades ne précisent pas si les mortalités sont totales et si des possibilités de reconquête existent.
En terme de tendance, 20% des brigades signalent la disparition de populations, 45% signalent le maintien des populations et 10% signalent de « nouvelles populations », dont la découverte est vraisemblablement à mettre en relation avec l'effort de prospection en augmentation pour cette espèce. Par rapport à l'enquête de 2001, on observe que A. pallipes est signalée dans cinq nouveaux départements : l'Oise (3 sites), l'Aisne (3 sites), la Meurthe-et-Moselle (1 site), l'Essonne (1 site) et la Vendée (1 site). Dans ces départements, les prospections nocturnes réalisées dans le but de rechercher cette espèce ont permis de la mettre en évidence alors que dans certains cas (Meurthe-et-Moselle , Oise, Essonne), elle n'avait jamais été mentionnée
auparavant (CHANGEUX, 2003). On constate également que l'espèce n'est plus mentionnée dans deux départements, le Pas de Calais (uniquement mentionnée en 2001) et le département de la Creuse, où selon la
brigade départementale l'ensemble des sites connus a été déserté suite des mortalités massives observées au cours de l'année 2001 et dont l'origine n'a pu être déterminée. Pour ce département on observe pour la période concernée un développement très important de l'écrevisse du Pacifique.
L'enquête montre également qu' Austropotamobius pallipes est une espèce surtout présente dans les cours d'eau, bien qu'elle soit parfois mentionnée en plans d'eau (10 cas). Elle occupe surtout les cours d'eau à vocation salmonicole (2269 sites), et n'est que peu signalée sur les cours d'eau de seconde catégorie piscicole (222 sites). L'aire de répartition de cette espèce couvre les quatre domaines biogéographiques (cf. carte n01).
- l'espèce semble moins bien représentée sur le domaine atlantique, elle n'est pas mentionnée au centre et au nord (région parisienne et nord de la France), mais aussi sur une grande partie de la façade ouest ;
- sur le domaine méditerranéen, l'espèce est présente dans tous les départements, avec des niveaux de population variables. C'est dans les Bouches du Rhône que sa situation semble la plus délicate.
- sur le domaine continental, l'espèce est présente dans l'ensemble des départements à l'exception toutefois des départements de l'Aube et du Bas-Rhin, où l'espèce était historiquement présente (BALDNER, 1888 ; LAURENT et SUSCILLON, 1962 ; ANDRE, 1960) mais où elle n'est plus observée (disparition probable) malgré des recherches actives localement. En outre l'espèce n'est plus mentionnée dans le département de la Creuse (mortalités massives en 2001), dans le département voisin de la Haute-Vienne, une seule population qualifiée de {( relictuelle » est signalée.
- enfin sur le domaine alpin, l'espèce est présente en Haute-Savoie, en Savoie, en Isère et dans les Hautes Alpes. Les populations recensées voient leur aire de répartition colonisée par l'écrevisse du Pacifique, bien implantée dans le Lac Léman et dont l'expansion semble très rapide.
Sur les 76 départements où l'espèce est recensée, la pêche est autorisée dans 33 départements et interdite dans 42 départements. Là où la pêche est autorisée l'espèce fait généralement l'objet d'une pêche par les amateurs que l'on peut qualifier d'active, la période de 10 jours d'ouverture prévue par la loi est parfois raccourcie afin de limiter les prélèvements sur l'espèce.

2-1-2) L'écrevisse à pattes rouges Astacus astacus (Linnaeus, 1758) - Code ASA
Ecrevisse à pattes rouges (Astacus astacus) - mâle - photo : Marc COLLAS
Description de l'espèce

L'écrevisse à pattes rouges est une espèce d'Europe centrale qui touche en France les limites occidentales de son aire de répartition. Les différentes enquêtes montrent que l'espèce se rencontre surtout dans le nord-est (régions Alsace, Lorraine, ChampagneArdenne et Bourgogne).
Au niveau national, il semble que l'espèce ait toujours fait l'objet de nombreux essais de transplantation, d'abord en vue de sa réintroduction suite aux épidémies de peste et ensuite à des fins de production extensive. Ces expérimentations ont connu des succès divers. Cette espèce affectionne les eaux calmes des rivières à court lent, et des plans d'eau. Au niveau typologique, on la rencontre généralement dans les petites rivières de plaine. La bibliographie et les mentions historiques mentionnent que l'espèce fréquentait les grandes rivières (zone à brème) comme la Moselle et ses affluents aux alentours de Metz (PEUPION, 1898), ou la Meuse à Verdun, l'III aux portes de Strasbourg (BALDNER, 1888). Dans son ouvrage PEUPION (1898) mentionne que l'écrevisse à pattes rouges « se rencontre d'abord dans les cours d'eau où vivent les poissons tels que Carpe, tanche, chevesne, poissons blancs divers et enfin perche et brochet », il précise également « on les trouvait dans toutes les rivières en Lorraine et en Alsace-Lorraine.. . la Meuse sur tout son cours français et belge .. . la Moselle dont le cours en Prusse étai plus productif que le cours français ... La Meurthe, la Sarre, l'III et l'Aube » , Ses populations ont été décimées par l'apparition de l'Aphanomycose (peste des écrevisses) à la fin du XIXo siècle.. PEUPION (1898) indique « il a fallu tout au plus une année pour que la destruction fut complète dans tout le cours de la Moselle, de même dans celui de la Meuse, la ruine des cours d'eau lorrains et belges date de l'année 1878 », DE DROUIN DE BOUVILLE (1906) précise que « les premières manifestations eurent lieu en 1876, en différents point d'une assez vaste superficie, celle occupée par les départements de la Meuse, de Meurthe-et-Moselle, des Vosges, de la Haute-Saône, du Jura, de la Côte d'Or, de la Nièvre, de l'Yonne et de l'Aube . Le mal paraÎt avoir pris naissance en Lorraine », Il indique également « A la fin de l'année 1885, la peste avait exercé son action dévastatrice sur presque toute la surface du territoire français» . En une décennie, les peuplements ont été décimés. De nombreuses opérations de repeuplement ont dès lors été entreprises dans ces régions, ainsi dans le département de Meurthe-et-Moselle, 75 000 écrevisses en provenance de Silésie et de Pologne ont été déversées dans les cours d'eau du département à partir de 1881 grâce à des crédits votés par les Conseils Généraux (DE DROUIN DE BOUVILLE, 1901). Des tentatives identiques ont eu lieu dans le département de la Moselle (COLLAS, données non publiées).

Situation en 2006

En 2006 l'espèce est mentionnée dans 21 départements (16 en 2001), sur 115 sites. 44 sont situés sur des cours d'eau de première catégorie piscicole et 8 sur la seconde catégorie piscicole , 71 sites correspondent à des plans d'eau (62% des sites). L'aire de répartition naturelle couvre la partie Nord-Est du domaine continental, c'est à dire l'Alsace (Bas-Rhin : 11 sites), la Lorraine, région qui regroupe à elle seule prés de 50% des sites recensés, l'espèce est encore observée dans les quatre départements, et c'est en Moselle qu'elle semble la plus abondante (36 sites localisés pour la majorité dans les Vosges du Nord).
L'espèce est également observée en Champagne-Ardenne dans les départements de la Haute-Marne (7 sites), où suite à son introduction dans des plans d'eau elle a également colonisé certains cours d'eau, dans la Marne (4 sites) et dans les Ardennes (1 site). Les inventaires réalisés dans ces départements ces dernières années ont permis de préciser le statut de cette espèce dans cette région et de mettre en évidence des populations méconnues (JULIEN et al ; 2005). La Bourgogne (Nièvre : 9 sites, Yonne: 2 sites en plans d'eau (BLATTER O. com.pers.)) et la Franche-Comté (Haute-Saône : 11 sites) semblent constituer la limite sud-ouest de répartition .
Globalement même si l'aire de répartition de cette espèce s'est étendue au niveau national, on constate qu'elle est principalement le fait de tentatives d'introductions à des fins d'élevage (astaciculture extensive). Plus localement, et dans son aire de répartition naturelle , les populations continuent de régresser et de disparaître avec des mortalités massives sur certains sites sans identification précise de l'agent pathogène (SARAN P., com.pers.). L'espèce réussit à se maintenir dans de petits plans d'eau privés, mais on peut la considérer comme disparue des rivières de plaine qui constituaient autrefois son habitat de prédilection et où elle était abondante.
L'espèce, qui a aujourd'hui déserté la quasi-totalité du réseau hydrographique subsiste essentiellement dans des petits plans d'eau forestiers , exempts de pollution, et où les espèces exotiques sont absentes. Elle colonise partois l'émissaire des plans d'eau, mais son implantation est souvent limitée. L'espèce concurrence l'écrevisse des torrents , suite à son introduction dans des plans d'eau, d'où elle s'est échappée (COLLAS M., 2005) Par rapport à 2001, ASA est observée dans sept départements supplémentaires généralement sur un seul site et souvent suite à une opération de réintroduction (Allier, Côte d'Or, Drôme, Seine-et-Marne) seul le département de la Haute-Vienne compte 2 sites, alors que dans la Marne l'espèce est introduite dans des étangs conservatoires (GUIDOU F., Corn.pers.). Enfin, l'espèce est à nouveau signalée dans le département des Ardennes (déjà signalée en 1977 et 1995) sur un cours d'eau de première catégorie piscicole. Par contre, elle n'est plus mentionnée dans le Cantal et le Puy-de-Dôme. La pêche de cette espèce est très limitée, en raison de sa disparition sur le réseau hydrographique, elle est toutefois prélevée dans quelques plans d'eau privés pour alimenter la restauration locale, c'est le cas dans les Vosges du Nord, où un projet de développement d'étangs conservatoires est en cours de réalisation. La situation de A. astacus doit donc être considérée comme alarmante. Actuellement, la survie de cette espèce est directement liée à son intérêt gastronomique et aux essais d'astaciculture extensive dont elle fait l'objet par des particuliers.

dimanche 6 juillet 2014

L'EAU, MILIEU D'ELEVAGE, ET SA MAITRISE EN AQUACULTURE

L'approvisionnement en eau est un élément essentiel de la ferme aquacole d'eau douce ou salée.
L'évaluation des besoins en eau par rapport à un objectif de production, la connaissance du potentiel en eau naturelle, la coût de la valorisation de ce potentiel : pompage, recyclage, chauffage, etc… autant de démarches, que l'entrepreneur aura à effectuer s'il veut minimiser les risques et optimiser la rentabilité de son affaire.
L'eau est nécessaire comme :
1.    Milieu d'élevage: un volume d'eau minimum doit être conservé pour permettre la vie des animaux. L'évaporation, les infiltrations tendent à réduire ce volume.
2.    Transporteur d'oxygène : les animaux utilisent de l'oxygène dissous, celui-ci est emprunté au milieu extérieur, ou produit dans l'élevage à partir d'oxygène de l'air ou d'oxygène industriel.
3.    Transporteur de résidus alimentaires ou de produits du métabolisme : ces déchets sont évacués dans le milieu extérieur ou détruits à l'intérieur de l'élevage (épuration).
4.    Transporteur de calories: pour éviter l'échauffement des bassins, le maintien d'un débit d'eau important peut être requis (cas de certains étangs tropicaux). En écloserie, ou recherche au contraire à limiter le débit d'apport pour éviter les dépenses d'énergie liées au refroidissement (stockage de géniteurs) ou au chauffage (incubation et alevinage).
On constate ainsi que seule la fonction № 1: l'apport d'eau pour compenser les pertes, nécessite toujours une source d'eau naturelle (fig. 1).
Les fonctions d'oxygénation, d'épuration, de thermorégulation peuvent toutes s'effectuer à l'INTERIEUR de l'élevage, sans appel au milieu naturel (fig. 2):
- soit par équilibre biologique dans l'élevage, c'est le cas d'un ETANG,
- soit par une machinerie, qui assure ces fonctions : c'est le cas d'une ECLOSERIE en CIRCUIT FERME.
Signalons enfin que l'eau peut être un transporteur de nourriture. Dans les élevage de bivalves, par exemple, cette fonction peut être déterminante pour la détermination de besoins en eau.
L'évaluation du potentiel en eau d'un site aquacole dépend donc :
- des capacités du site à remplir une ou plusieurs des fonctions décrites ci-dessus,
- du niveau d'investissement et du coût de fonctionnement, en matériel de traitement d'eau, compatibles avec la rentabilité de l'affaire.
L'analyse de ce potentiel en eau suppose donc que l'on connaisse les cycles de production (en fonction du marché) qui peut être envisagé.
De ces cycles de production découleront un certain nombre de valeurs de stocks à maintenir, ce sont elles qui détermineront les besoins en eau à satisfaire. On déduit ainsi, pour un site donné, le degré de mécanisation (d'investissement) à assurer pou le poste “EAU”
Les besoins en eau varient considérablement avec le mode de nourissage et par conséquent avec la croissance des animaux.
Sachant que les fonctions 1 et 2 (maintien du volume, fourniture d'oxygène sont nettement moins coûteuses à mécaniser que les fonctions 3 et 4 (transport des résidus, thermorégulation) on aura intérêt à étudier des cycles de production avec différentes stratégies de nourrissage.
EXEMPLE:
Le point de blocage d'un système d'élevage pour sa rentabilité est l'oxygène disponible en été (soit du fait du débit limité ou de la température élevée, ou encore du fait des deux facteurs conjugués).
Solution 1 -
Vente du stock avant l'été (pas d'investissement supplémentaire)
Solution 2 -
Oxygénation + nourrissage à la ration minimale (maintien en poids du stock, sans croissance).
Cette solution permet de maximaliser le stock conservé pendant l'été, (en vue d'une vente à des cours intéressants en automne par exemple). L'aliment n'est pas rentabilisé au niveau de l'indice de transformation (gain de poids nul).
Solution 3 -
Oxygénation + nourrissage à un taux supérieur à la ration minimale, donnant lieu à la croissance du stock.
Cette solution obilge à réduire le stock (consommation d'oxygène, autopollution), mais permet d'amener les animaux à la taille recherchée. Elle rentabilise mieux le poste aliment que la solution précédente.
Solution 4 -
Oxygénation + épuration de l'eau + nourrissage
Le stockage est maximum et la croissance est maintenue. Cette solution, très coûteuse en investissement, reste possible sur de petites unités et sur un poste particulier de l'élevage (écloserie, stockage de géniteurs).
Le maintien du volume d'élevage suppose le maintien d'un débit compensant les pertes naturelles (évaporation et infiltration) et volontaires : renouvellements d'eau dus aux traitements sanitaires, aux nettoyages des installations, etc…
Le choix des structures (bassins en terre, en béton), la possibilité de couverture, les facilités d'isolement hydraulique des différentes parties de l'installation, influeront sur les besoins.
Les valeurs à affecter à ces différents types de pertes sont à collecter sur place pour chaque site : elles dépendent en effet des caractéristiques climatiques et pédologiques locales (température, hygrométrie, couleur des eaux, perméabilité, etc…)
En tant que transporteur d'oxygène, nous aurons à déterminer deux paramètre de l'eau de l'élevage :
- La quantité d'oxygène qu'il sera nécessaire d'introduire dans l'eau pour satisfaire les besoins des animaux, (et éventuellement l'oxydation des déchets). en terme de flux de gaz (Kg d'oxygène par heure),
- la teneur en oxygène à maintenir pour le confort des animaux (seuil en dessous duquel la croissance, l'indice de transformation, la reproduction sont perturbés), il s'agit alors d'une concentration (gramme d'oxygène par mètre cube d'eau).
Ces deux paramètres varient avec l'espèce, la taille, la température, l'alimentation et l'activité des animaux. Leur calcul va servir à dimensionner l'ensemble du système d'oxygénation, qui comporte :
- l'eau d'apport
- les dispositifs et machines de production d'oxygène dissous.
A un instant donné, le système d'oxygénation de l'élevage aura une capacité maximale d'oxygénation fixe, correspondant aux investissements que l'on aura jugé utile de faire pour le poste “oxygène”.
Face à cette capacité fixe on aura une demande en oxygène variable du fait de l'alimentation et d l'activité des animaux, des teneurs en oxygène à maintenir variables suivant les bassins du fait des différences de tailles des animaux.
Le dimensionnement du dispositif d'oxygénation se fera donc généralement à partir de la connaissance :
- de la moyenne sur 24 H, de la demande en oxygène,
- des bassins instantanés maximum liés au nourrissage.
On admet que la capacité d'oxygénation du système doit couvrir la totalité des besoins moyens, et dans une proportion moindre les besoins instantanés maximum (ce qui implique qu'on admet des baisses de la teneur en oxygène dans les bassins).
En effet, le coût des installations nécessaires pour couvrir la totalité des besoins en oxygène, représente souvent un investissement non rentable et n'est pas justifié par une amélioration significative des résultats d'élevage (mortalités, indice de transformation, croissance).
Besoins moyens: Annexes I
La plupart des modèles de calculs se basent sur la taille des animaux et la température de l'eau pour évaluer la demande moyenne en oxygène.
Comme ces deux paramètres servent également à déterminer la ration alimentaire, il est possible, dans un élevage nourri, d'évaluer la quantité d'oxygène à fournir à partir de la quantité d'aliment distribué.
Ainsi pour un aliment type “Truite” (40 % de protéines) on constate qu'il faut 300 g d'oxygène dissous par kilo d'aliment.
Besoins instantanés
Le mode de nourrissage est souvent déterminant sur les fluctuations journalières de la demande en oxygène. (fig. 3)
La comparaison de la concentration d'oxygène des bassins suivant que le nourrissage a été fait manuellement, en libre service, rationné ou non, met en évidence le phénomène (FAURE, 1983) fig. 4).
La conception du planning de nourrissage est donc à faire en concordance avec le dispositif d'oxygénation.
Contrairement aux élevages terrestres, les déchets de nourriture et les déjections des animaux ne sont pas captables à l'émission dans un élevage aquatique.
Ces déchets sont immédiatement dilués dans le milieu et peuvent donc, s'ils ne sont pas éliminés s'y accumuler et perturber les animaux.
Eliminer les déchets suppose un déchets suppose un débit d'eau évacuant ceux-ci à l'extérieur, combiné ou non à des dispositifs d'épuration.
Les besoins en eau et l'importance des dispositifs d'épuration vont dépendre de la teneur en polluants qui peut être considérés comme admissible dans l'exploitation, en terme de mortalités, d'indice de transformation et de croissance.
Comme pour l'oxygène un premier dimensionnement pourra être établi à partir de la composition moyenne du rejet des bassins sur 24 h., dimensionnement qui pourra être affiné à partir de la connaissance des fluctuations journalières et des valeurs maximales de pollution.
Les expériences menées en trutticulture montrent qu'il est acceptable et plus simple de calculer la pollution à partir des quantités d'aliments déversés dans les bassins.
A titre indicatif, voici les valeurs obtenues avec de l'aliment type “truite” (aliment sec, 40 – 45 % de protéines) d'après FAURE (1983)
AMMONIAC : (NH3 + NH4) = 0,03 A × Ks.
Ks, facteur compris entre 1 et 2 lorsque l'on dépasse 1 mg/1 d'ammoniac dans l'eau. Ks est un facteur prenant en compte le fait que la présence d'ammoniac au dessus de 1 mg/1 entraîne augmentation de la production d'ammoniac par Kg de truites.
Calcul de Ks ou coefficient de stress : ce coefficient est calculé à partir du nombre de réutilisation de l'eau.
Ks = 0,875 + 0,125 N
N, nombre de réutilisation de l'eau après désoxygénation.
La quantité de matières solides émises varie fortement avec l'indice de conversion de l'aliment.
DCO = 3,7 DBO5
Pour l'évaluation des redevances à la pollution le calcul est fait à raison de :
PHOSPHATES PO4 = 0,014 A
PT (phosphate total) = 0,025 A
Note : Ces résultats diffèrent sensiblement de ceux obtenus auparavant aux U.S.A. KRAMER, CHIN and MAYO, 1972).
Ces relations sont valables pour des animaux nourris avec rationnement.
Les cas des animaux en période de jeûne, et des animaux soumis à une suralimentation devra être traité séparément.
Ainsi l'excrétion azotée est 3 fois plus élevée pour un poisson après alimentation, que pour un poisson à jeun. (KAUSHIK, 1980) fig. 5 – 6.
La température de l'eau est toujours un facteur coûteux à maîtriser.
Le contrôle de la température se limite généralement à l'eau alimentant l'écloserie avec trois circuits distincts :
1.    Les bassins de stockage des géniteurs(à refroidir)
Cette pratique de développe en salmoniculture pour les reproducteurs soumis à un conditionnement photopériodique destiné à obtenir des pontes d'été.
Le stockage des géniteurs de turbots, daurades et loups pose des problèmes similaires (perturbation de la maturation des gamètes à températures excédant 10 – 15° C suivant les espèces).
2.    Les écloseries, c'est à dire les installations recevant les oeufs et les alevins, AVANT nourrissage. Le chauffage ou le refroidissement peuvent être recherchés.
3.    Les stations d'alevinage avec nourrissage, où l'on recherche une accélération de la croissance par chauffage de l'eau.
Le contrôle de la température est atteint avec des conditions économiques acceptables dans le cas des eaux réchauffées de centrales. Lorsque le traitement thermique s'effectue dans l'exploitation piscicole, un recyclage intensif des calories ou des frigories est nécessaire, ce qui implique des dispositifs d'épuration coûteux, soit pour regénérer la qualité de l'eau d'élevage (recyclage), soit pour protéger les échangeurs de l'encrassement par les salissures de l'élevage (cas des échangeurs entrée-sortie).
La conception du chauffage de l'eau doit en outre prendre en compte les problèmes de stress thermique, et de sursaturation en gaz.
L'évaluation des quantités d'oxygène et de calories à fournir, et de la quantité déchets à évacuer, permet de déterminer les débits d'eau requis, et la machinerie à acquérir et donc d'avoir un ordre de grandeur de l'investissement.
Le choix du site et du matériel suppose la connaissance précise des caractéristiques physico-chimiques que l'on souhaite voir maintenues au niveau de l'eau des bassins.
Les paramètres mesurables ou calculables avec des moyens relativement simple sont au nombre de 10 : la température, l'oxygène, l'ammoniaque, les nitrites, les nitrates , le pH, le gaz carbonique, l'alcalinité), (la dureté), les matières en suspension et la matière organique. Pour les eaux salées, il s'y ajoute la salinité.
D'autres paramètres sont à contrôler lors de l'évaluation du site : polluants de toute nature, métaux lourds, etc…
Les dix paramètres cités précédemment sont ceux qui intéressent tous les aquaculteurs en routine.
Si l'on est amené à fournir mécaniquement une quantité déterminée d'oxygène (Kg/H), le coût du Kg d'oxygène fourni sera d'autant plus élevé que la teneur en oxygène dans les bassins sera élevée.
Ceci tient au rendement décroissant des appareils d'aération, lorsque la concentration en oxygène dissous s'élève (voir plus loin).
En terme de rendement énergétique de l'appareillage, on a donc intérêt à choisir la valeur la plus basse possible.
Mais d'autres critères interviennent et l'on peut résumer les critères de choix de la manière suivante (fig 7).
- seuil de résistance:
ex : 2,5 – 3,0 mg/1 pour la truite
1,0 – 2,0 mg/1 pour le bar
Des mortalités importantes sont constatées à ces teneurs. Elles sont en principe incompatible avec l'élevage.
Elles représentent les valeurs minimales qui peuvent être tolérées sur des périodes transitoires (post alimentation par exemple).
- seuil de dépendance physiologique :
ex : 5,0 – 5,5 mg/1 pour la truite
3,0 – 4,0 mg/1 pour le bar
Des teneurs inférieures à ce seuil entraînent une diminution de croissance et une augmentation de l'indice transformation. L'animal réduit sa consommation d'oxygène.
Le maintien de telle teneur ne permet généralement pas un nourrissage important. Seul le coût très élevé de l'oxygénation peut conduire à conclure qu'il est plus rentable de travailler à des teneurs en oxygène dissous, inférieures à ce seuil.
- seuil de dépendance alimentaire:
ex : truitelles : 8,0 mg/1
Il existe peu d'expérience ayant permis de fixer ce seuil pour différentes espèces.
Il semble que lorsque l'on nourrit abondamment les animaux, soit plus de 60 % de la quantité maximale qu'ils auraient pu ingérer, on soit amené à relever la teneur en oxygène dissous des bassins si l'on veut éviter une baisse de l'efficacité alimentaire (augmentation de l'indice de transformation).
On détermine ainsi qu'il existe un optimum économique entre les dépenses d'aliment, qui augmentent lorsque le taux d'oxygène baisse, et les dépenses d'électricité liées à l'aération, qui augmentent lorsque le taux d'oxygène augmente.
Le contrôle de l'oxygène dissous se fait par dosage ou plus facilement à l'aide de sonde (600 à 1 200 $).
La température intervient dans tous les processus physiologiques : la croissance, les besoins alimentaires, la consommation d'oxygène augmentent avec la température.
Pour chaque espèce, il existe une température optimale.
Le chauffage ou le refroidissement visent à rétablir cette température. il s'agit en général d'aboutir à un contrôle de la vitesse de croissance des juvéniles ou encore à obtenir la maturation des géniteurs.
Une autre circonstance où intervient la prise en compte de la température est lors du transfert des animaux avec changement de température.
En règle générale, le choc thermique sera bien supporté si l'on reste dans la plage de température encadrant la température optimale.
Pour les températures extrêmes, les temps d'acclimatation seront d'autant plus longs que l'on s'éloigne de la température optimale (fig. 8).
L'ammoniaque (NH4 OH) se présente dans l'eau sous forme d'ion ammonium (NH4 +) ou de gaz dissous (NH3).
Le suivi en élevage se fait à l'aide d'analyses basées sur des réactions colorimétriques dont la mesure est faite, à l'oeil pour les “trousses” (70 à 100 $), ou avec un colorimètre ou un spectrophotomètre (1 000 à 1 500 $).
La mesure effectuée donne une valeur exprimée en poids d'azote, ou en poids d'ammoniaque (la confrontation avec les valeurs seuils admises en élevage doit se faire en concordance avec le mode d'expression du résultat).
Cette valeur est toujours la sommation de l'ammoniac gazeux et de l'ion ammonium.
Pour la conduite de l'élevage, nous utiliserons :
1.    La valeur ammoniac (NH3) + ion ammonium (NH4 +) comme indicateur général de pollution et de bon fonctionnement de l'élimination des déchets.
Des bassins correctement drainés ou épurés auront une eau qui oscille entre 0,5 et 2,5 mg/1 de (NH3 + NH 4 +).
La sensibilité des poissons eux-mêmes varie suivant l'espèce et les résultats sont très différents selon que les tests ont lieu en laboratoire avec l'ammoniaque seule ou en bassins avec un environnement complexe (MES, CO2, etc… ).
Ainsi la truite présenterait un état de stress dès 1 mg/l; alors que l'anguille serait peu sensible à l'ammoniaque.
2.    La valeur en ammoniac non ionisé (NH3)
Sa toxicité est notoire pour à peu près toutes les espèces.
Les seuils sont de l'ordre de 2,10-3 mg/l à 5,10 -2 mg/l suivant la taille des animaux et les espèces. (tableau) HAYWOOD G.P. (1983) a fait une synthèse des seuils à prendre en compte.
La valeur d'ammouniac dissous (NH3) s'obtient par calcul à partir des valeurs de température, de pH et d'ammoniaque total (fig. 9).
Suite à une intoxication à l'ammoniaque, il est souhaitable pour une bonne récupération des animaux en eau fraîche de porter la température à 10° C au moins, et d'assurer une bonne oxygénation.
Les nitrites sont toxiques en eau douce à des doses de 0,015 à 0,2 mg/1.
Comme pour l'ammoniaque, la dissociation de deux espèces chimiques est à prendre en compte.
L'ion nitreux No2 - (mesuré en poids de l'azote ou en poids de No2) et l'acide nitreux (H No2) sont présents, mais dans la gamme de pH intéressant les élevages de poissons seul NO2 l'est en proportion significative.
La toxicité de NO2 diminue lorsque le pH augmente (à l'inverse de H No2). Elle diminue aussi avec la salinité (présence de chlorure) d'où son importance moindre en eau de mer.
Les nitrates ne sont pas toxiques. Ils servent d'indicateurs pour le fonctionnement des systèmes d'épuration à base de filtre biologique. Les renouvellements minimum obligatoires limitent leur accumulation des valeurs de 50 – 150 mg/l.
La chevrette (Macrobrachium rosenbergii) serait incommodée à partir de 175 mg/l.
Les équilibres calco-carboniques sont très importants en milieu aquatique. Le pH est déterminant pour la toxicité de l'ammoniaque, des nitrites et du CO2.
Pour suivre l'évolution de ces facteurs les mesures simples dont dispose l'éleveur de poissons sont les suivantes :
- mesure du pH (par colorimétrie ou à l'aide de sonde, (coût 200 $).
- mesure de la dureté (colorimétrie)
La concentration de gaz carbonique peut être alors calculée de façon simple (fig. 10) en admettant que l'on n'a que des bicarbonates (et pas de carbonates) ce qui est justifié jusqu'à pH 8,3.
La concentration de gaz carbonique ainsi calculée est celle que l'on aurait à l'équilibre, elle peut être supérieure si l'aération (stripping du CO2 agressif) est insuffisante.
Le CO2 se comportant comme un acide, il influe sur le pH (fig. 11). Sa toxicité dépend étroitement du pH.
En pratique, on tiendra compte ainsi,
1) de l'accumulation de CO2 en milieu confiné (cuve de transport par exemple). Dans ce cas, l'aération peut être suffisante pour l'oxygénation, mais insuffisante pour éliminer le CO2.
On a alors accumulation de CO2 et diminution du pH. La toxicité du CO2 commence dès 9 – 10 mg/l à pH 5. (contre 20 mg/l à 6,0 et 100 mg/l au dessus de pH 7,0) Ce phénomène est lié à la respiration des poissons (44 g de CO2 produit pour 32 g d'oxygène consommé), et des plantes (la nuit essentiellement).
2) des remontées brutales de pH qui peuvent entraîner des intoxications à l'ammoniac, et qui se produisent lors des mises en route d'installation d'aération, ou du fait de la présence de plantes qui consomment le CO2 (photosynthèse le jour). (fig. 12)
La présence de MES peut être liée aux apports amont (sable) ou à une production in situ dans l'élevage.
Une bonne gestion de l'alimentation réduit considérablement les MES. (FAURE, 1983).
Leur toxicité directe est généralement, faible, par contre, ils induisent des problèmes pathologiques, tels que les attaques des branchies des alevins par myxobactéries.
Ils influent sur l'élevage de différente manières :
- si l'eau est trouble, la prise de nourriture peut être affectée, ce qui réduit l'efficacité alimentaire et accroit la pollution.
- Ils peuvent donner lieu à l'apparition d'algues microscopiques donnant une saveur désagréable à chair du poisson.
- Ils perturbent le fonctionnement des filtres biologiques destinés à la nitrification. En effet, aux particules carbonnées qui les composent sont associées des espèces bactériennes dominantes par rapport aux bactéries assurant la nitrification.
- enfin ils polluent l'environnement à la sortie des élevages
Pour toutes ces raisons, l'équipement en ouvrage de piégeage des MES est souvent nécessare.
L'essentiel des aménagements a été par diapositives. Nous ne reprendrons donc pas dans cet exposé l'étude cas par cas du matériel, ce qui demanderait un temps dépassant le cadre imparti.
Nous étudierons les principes mis en oeuvre, en vue de proposer une méthode de choix basée sur les objectifs d'élevage, exposés précédemment, et les performances du matériel.
Les techniques en cause sont:
1.    L'équipement de la prise d'eau : on se reportera à l'annexe 2
2.    L'aération et l'oxygénation
3.    L'épuration de l'eau
4.    la stérilisation de l'eau.
Ces techniques concernent :
- tous les élevages (1).
- le grossissement du poisson en bassins, et à moindre degré en cages (2),
- les écloseries et stations de production des juvéniles (2) (3) (4).
3.1 L'AERATION ET L'OXYGENATION :
Nous réserverons le terme “Aération” aux procédés utilisant l'air, et le terme “Oxygénation” aux appareils utilisant l'oxygène industriel.
L'aération est un poste énergétique important en élevage intensif : 13 – 15 % pour grossissement de truites en bassin, 23 % dans une station d'alevinage (ALAVOINE - 1981).
Le coût et l'importance que devra lui accorder l'exploitant varieront d'un pays à l'autre suivant la législation fixant la prix de l'énergie.
ex. : En France, l'aération des bassins de grossissement n'est pas un facteur économique déterminant : le prix du Kw/h d'été est faible. Inversement, l'implantation d'une écloserie fonctionnant l'hiver devra être étudié : le prix du Kw/h d'hiver est en effet élevé.
L'objectif de l'aération est de faire passer de l'oxygène gazeux contenu dans l'air à l'état dissous, seule forme utilisable par la plupart des poissons.
L'utilisation de l'air comporte un avantage important : il est gratuit
A cet avantage, s'associent deux inconvénients :
- L'air ne contient que 21 % d'oxygène,
- L'air contient 78 % d'azote.
En conséquence, l'appareil devra être efficace, puisqu'il travaille avec un gaz pauvre en oxygène, mais pas “trop efficace”, car il peut alors dissoudre une quantité importante d'azote. La quantité de gaz dissous est alors telle que l'on a “sursaturation”. c'est à dire que la pression des gaz dissous est supérieure à celle du gaz au contact de l'eau, entrainant des phénomènes d'embolie gazeuse dans le cheptel.
La dissolution d'oxygène résulte d'un ensemble de phénomènes, dont chacun d'eux est utilisé de façon plus ou moins importante suivant les procédés (fig. 13).
1) “Enrichissement” de l'air à l'aide d'oxygène industriel,
2) agitation de l'interface gaz-liquide: en effet, il existe un “film” s'opposant au passage des gaz dont l'épaisseur diminue avec l'agitation.
3) temps de contact gaz-liquide: plus les bulles resteront longtemps dans l'eau ou les gouttelettes d'eau dans l'air, plus l'oxygénation sera importante.
4) Surface de contact gaz-liquide: plus les bulles ou les gouttelettes seront petites, plus l'efficacité du dispositif sera grande.
5) Pression du mélange diphasique: le fait de préssuriser le mélange d'eau et d'air augmente les échanges (attention aux sursaturations).
6) Renouvellement de l'eau dans le volume de travail de l'aération: plus le renouvellement sera important plus le rapport Kg d'o2 dissout produit/Kw/h dépensé sera important, mais dans le même temps le rapport Kg d'O2 dissous/m3 d'eau (concentration) diminue. La prise en compte de ce facteur a lieu lors de l'utilisation de l'appareil et dépend donc de l'installation réalisée par l'éleveur.
L'annexe 3 donne l'expression mathématique de ces phénomènes.
La détermination du résultat obtenu en bassins pour un procédé donné dépend de nombreux facteurs, nous proposons ci-dessous un système d'évaluation simplifié, qui, à notre avis suffit souvent en aquaculture.
L'aquaculteur devra se procurer ou déterminer:
- auprès du constructeur de l'appareil ou du concepteur du procédé deux caractéristiques générales: l'apport spécifique brut (ASB) et la capacité d'oxygénation standard (COS). La première caractéristique s'exprime en kg d'O2/H
- La température et la salinité de l'eau à aérer,
- une table de saturation en oxygène, en fonction de la température et de la salinité,
- la concentration en oxygène de l'eau avant aération,
- la concentration en oxygène de l'eau après aération,
- le débit à traiter et la demande en O2 du stock.
Conduite du calcul:
1) Calcul du facteur de correction de performances
Les performances annexées par le constructeur ayant été établies en conditions standard, il faut les corriger pour les adapter aux conditions d'élevage.
F, facteur de correction
Cs, saturation de l'eau en oxygène dans les conditions de température et salinité (utiliser la table)
C, concentration en O2 de l'eau avant l'aérateur.
2) Apport de l'appareil
CO = COS × F
CO, capacité d'oxygénation en Kg d'O2/H
COS, donnée constructeur
Rendement de l'appareil
R = ASB × F
R = rendement en Kg d'O2 dissous/KWK
ASB = donnée constructeur
3) Exemple
Données: - Bassins contenant 6 T de Turbots à 18° C
- Demande en Oxygène du turbot: 180 g/T/H à cette température (JONES, 1981)
- Débit d'eau: 225 m3/H, oxygène entrée: 2 mg/1
- Concentration d'oxygène désirée: 3 mg/1 en sortie de bassin
- Saturation en oxygène à 18° et 35 0/00 de salinité: 7,66/1 (R.F. WEISS, 1970).
Appareil: aération par bulles et air lift combiné. Les turbots ayant un comportement de fond, ce type d'aérateurs à l'intérêt de mettre l'eau en circulation verticale et en surface.
COS = 1,5 Kg/H
ASB = 0,4 Kg/KWH
Note: La concentration C avant l'aérateur, dépend de la teneur de l'eau d'entrée du bassin et de la teneur dans le bassin. Il conviendrait de la déterminer exactement si la concentration d'entrée et la concentration en bassin étaient très différentes. Elle est ici assimilée à la concentration d'entrée du bassin.
- Co = COS × F = 1,5 × 0,7 = 1,05Kg O2/H
- R = ASB × F = 0,4 × 0,7 = 0,28 Kg O2/KWH
- Nombre d'appareil (n)
- Oxygène nécessaire au poisson: 6 T × 180 g/H = 1080 g/H
- Rétablissement de la teneur en bassin: 225 × (3 -2 ) = 225 g/H
- Total à fournir DO = 1,305 Kg/H
On devra implanter deux appareils fonctionnant périodiquement ou chercher des appareils plus petits:
- Puissance consommée:
Remarques importantes:
L'application du facteur de correction montre que plus on relève la teneur en oxygène dissous; (pour une fourniture d'oxygène donné en terme de Kg/H) plus la puissance à fournir augmente.
Il en est de même si la concentration à saturation diminue, c'est à dire si la température augmente.
C'est ce qui explique l'inefficacité des aérateurs à haute température et l'utilité dans ce cas d'utiliser l'oxygène pur.
On trouvera en Annexes les éléments caractérisant la matériel d'aération et d'oxygénation.
Annexe 4
L'épuration de l'eau se pratique essentiellement en écloserie.
Les procédés mis en oeuvre sont:
- La décantation,
- la filtration,
- la nitrification sur support,
- l'écumage.
A un niveau expérimental, il existe des procédés utilisant:
- L'échange d'ions (sur réolithes)
- les cultures hydroponiques
- la flottation
- la dénitrfication.
Nous n'en parlerons pas ici.
La décantation:
C'est l'élimination des particules solides par captage et dépôt sur un support. C'est un procédé relativement simple et peu coûteux.
Les déchets issus d'un élevage aquacole seront d'autant plus difficiles à capter qu'ils auront séjourné longtemps dans les bassins et les systèmes d'évacuation de l'eau (FAURE, 1984)
La conception des bassins et de l'hydraulique est donc déterminante.
Le rendement étant généralement faible (40% environ), il faudra admettre une certaine pollution ou disposer d'autres procédés en sortie de décanteur.
On se reportera à l'Annexe 5, pour la description des principaux procédés de décantation.
La filtration biologique
Sous le terme de filtration biologique on désigne des procédés utilisant la propriété de certaines souches de bactéries de transformer certains polluants.
En aquaculture, c'est la transformation de l'ammoniac toxique en nitrates qui est visée. Il y a en même temps développement de matières vivantes (bactéries).
Il s'agit d'éliminer une pollution solubilisée pour la transformer en matières vivantes particulaires.
Les conséquences pour l'élevage sont:
- des difficultés importantes pour traiter les animaux en cas de maladie, la plupart des produits de traitement étant toxiques pour les bactéries épuratrices.
- une maintenance assez lourde, le développement du film bactérien sur le support implique des lavages si l'on veut garder son efficacité et éviter l'apparition de processus anaérobie dangereux pour les poissons. Le pH doit être contrôlé et maintenu au-dessus de 6,8 (chaulage).
Le gain retiré de la mise en place d'un tel système doit donc être conséquent:
- Gain important en énergie (chauffage, refroidissement) grâce au recyclage que permet la filtration.
- gain important des résultats d'élevage (croissance, maîtrise du cycle reproducteur…)
Les coûts liés au système, en dehors de l'investissement proviennent de:
- la circulation forcée de l'eau, nécessitant la plupart du temps un pompage.
- la fourniture d'oxygène : 5 g d'oxygène par gramme d'azote ammoniacal éliminé.
- du lavage, nécessitant la plupart du temps de l'eau et de l'air comprimé sous pression.
LES PROCEDES: (Annexe 6)
- Les boues activées: il n'y a pas de support, les bactéries épuratrices se développent sur les déchets maintenus en suspension par l'aération. Ce procédé est inadapté aux effluents très dilués de l'aquaculture. Il est parfois utilisé en carpiculture ou anguillicuture.
- Les disques biologiques: Ils ne nécessitent pas de lavage. Leur efficacité conduit, soit à des installations volumineuses et coûteuses, soit des qualités d'eau médiocre.
Le principe consiste à immerger périodiquement le support et le film bactérien. L'oxygénation se fait lors de l'émersion.
- Les filtres à supports immergés: Il en existe de nombreux types. Les plus efficaces et les plus compacts sont ceux utilisant des matériaux performants mis au point pour la nitrification des eaux de rivière en vue de leur potabilisation. Ils offrent l'avantage important d'une filtration mécanique.
En dehors de performances annoncées (Kg N-ammoniacal éliminé par 24h. et par m3 de matériau) on s'efforcera de déterminer:
- les qualités d'eau exigées à l'entrée: le prétraitement peut être plus coûteux que le filtre lui-même.
- les pressions nécessaires en fin de cycle (avant lavage)
- la qualité des répartitions d'eau à l'entrée et en sortie: une mauvaise répartition de l'eau rend le filtre inefficace (court circuit hydraulique de la masse filtrante)
- la complexité et l'efficacité du système.
On s'assurera:
- que l'oxygène en sortie d'élevage est suffisant pour l'oxydation de l'ammoniac (5 g O2/g N - NH4), sinon il faudra recirculer l'eau sur le filtre ou aérer dans le filtre.
- que l'eau est débarassée avant le filtre des MES et de la MO, sinon la nitrification n'aura pas lieu.
L'ECUMAGE: (voir Annexe 6)
Cette technique consiste à provoquer l'apparition d'une mousse, qui est riche en composés azotés et qui peut contenir une quantité notable de particules.
Cette mousse se forme spontanément en eau de mer au niveau des aérateurs.
La mise en oeuvre consiste donc à établir un bullage à l'intérieur d'une cheminée. La mousse est évacuée en haut de la cheminée.
Des appareils qu commerce existent, l'installation comporte comme unique réglage la hauteur de la cheminée au dessus du plan d'eau:
- trop haute, les mousse ont du mal à s'évacuer et l'épuration n'a pas lieu,
- trop basse, les mousses très hydratées du bas de la colonne sont évacuées et la perte d'eau devient excessive.
L'application de ce procédé à l'aquaculture a été étudiè par DIVANACH, (1978).
L'utilisation d'appareil de stérilisation des eaux est réservée aux écloseries.
La stérilisation de l'eau d'apport par le chlore est également pratiquée en écloserie; la neutralisation est faite par le sulfite avant utilisation.
La mise en oeuvre de la stérilisation suppose la connaissance des germes que l'on veut détruire. En effet, l'intensité germicide à appliquer diffère suivant les germes: un virus tel que la S.H.V. en salmoniculture est détruit par de faibles densités germicides, tandis que le virus de l'I.P.N. demandera des intensités considérables, qui en pratique ne pourront jamais être atteintes, (MAISSE et coll., 1980) (fig. 14)
HOFFMAN (1974) de ROSENTHAL (1981) ont fait la synthèse des données disponibles pour l'aquaculture.
La stérilisation par les U. V. est aisée à mettre en oeuvre, mais reste réservée aux petits débits. Compte-tenu des coûts d'investissement et fonctionnement (changement des lampes).
L'ozone utilisé pour les coquillages, reste d'application limitée vu la sensibilité des poissons aux résidus d'ozone (0,01 à 0,06 mg/1).
Le chlore est utilisé sur l'eau d'apport. Une neutralisation au sulfite gazeux, facile à réaliser, évite les problèmes de toxicité.
La réutilisation de l'eau permet d'accroître les stocks en place, et de pratiquer en écloserie et en élevage de juvéniles, le chauffage de l'eau dans des conditions économiquement acceptables.
L'aération et le traitement des eaux recyclées est généralement nécessaire.
Pour déterminer le rendement des procédés du'il faut mettre en place, on se fixe un objectif de concentration en bassin, le rendement nécessaire est obtenu par la formule suivante:
avec W, quantité de polluant déversé en gr/j (moyenne sur 24 h.)
Qo, débit d'apport en m3/j
C, objectif de concentration du polluant en bassin
Qp, débit recirculé
Par ce calcul, l'éleveur peut apprécier le matériel qui lui est proposé, par rapport à ses besoins.
4. CONCLUSIONS
La Maîtrise de l'eau en aquaculture suppose que l'on ait procédé à l'évaluation des flux d'oxygène et de polluants, que l'eau va avoir en charge d'amener et d'évacuer de l'élevage.
Un certain nombre de matériels peuvent permettre d'apporter des solutions en cas d'insuffisance du milieu naturel.
La connaissance des capacités et des rendements du matériel permet d'établir un projet d'aménagement.

Au cours de l'élevage, les données économiques (coût de l'énergie), commerciales (date de vente des produits), les méthodes de nourrissage, interfèreront avec la maîtrise de l'eau pour concourir aux décisions. La gestion de l'ensemble amène à prendre de nombreuses données, qui l'apparition de l'informatique peut aider à traiter.