Le secteur agricole joue un rôle économique et social sans précédent et contribue à la réalisation de la sécurité alimentaire, à la création des emplois et des revenus à la population active et à la création des biens et services. Il emploie près de 70% de la population active et contribue en effet à hauteur de 38 % à la formation du produit intérieur brut (PIB). Ce secteur regroupe l’agriculture dominée par les cultures vivrières, l’élevage, la pêche et la sylviculture. Le secteur agricole enregistre des recettes importantes dues à l’exportation de ses productions.
La pêche est une importante source d’aliments pour l’humanité. Elle assure, en outre, un emploi et procure des bénéfices économiques à ceux qui la pratiquent. Elle est une activité régulatrice de l’économie de plusieurs pays et source de diversification alimentaire en matière de protéine animale car le poisson demeure la protéine la plus accessible et la moins coûteuse pour les populations. Source importante de nutriments, vitamines et minéraux, le poisson, pris uniquement avec certains produits végétaux constitue un aliment complet.
Actuellement, avec l’évolution du nombre de pêcheurs, le perfectionnement des engins, des méthodes et de certaines pratiques, la pêche n’est plus une simple cueillette car les plans d’eau subissent des prélèvements excessifs alors que les rivières, lagunes et lacs sont sollicités pour d’autres usages et dégradés par l’érosion, l’assèchement, la pollution et bien d’autres nuisances.
La production annuelle de poissons au TOGO se situe de nos jours autour de 24 000 tonnes globales et les besoins globaux sont estimés à 61 000 tonnes. Le Togo se trouve obligé d’importer plus du tiers de ses besoins pour maintenir la consommation à son niveau actuel. Ces importations qui saignent l’économie nationale sont loin de se stabiliser, la population togolaise croissant de 2,9 % chaque année. Face à cette situation qui se crée au fil des jours, situation liée à la malnutrition due en partie à la déficience des rations en protéines animales, une solution est possible : la pisciculture.
Le système de production piscicole en Afrique repose sur l’étang comme structure et le Tilapia nilotica comme espèce d’élevage. Le manque de politique en matière de pisciculture a conduit aux problèmes de rentabilité des élevages. En effet, les pisciculteurs sont confrontés à un certain nombre de problèmes notamment la faiblesse des rendements des activités piscicoles liée aux difficultés de nourrissage des poissons et manque d’alevins ; la faiblesse de l’encadrement technique et la faiblesse du financement du secteur.
C’est pour améliorer la productivité des fermes piscicoles que la Coordination Togolaise des Organisations Paysannes et de producteurs agricoles a initié, dans le cadre du Projet d’Appui aux Organisations Paysannes d’Afrique (POAPA), la formation des pisciculteurs sur l’alevinage et la gestion des fermes piscicoles afin de renforcer leur capacité dans la durabilité de la production piscicole tendant à réduire les importations et améliorer la nutrition des populations.
Le tilapia du Nil, Oreochromis niloticus, est l’une des plus importantes espèces élevées actuellement dans les eaux douces tropicales et subtropicales. Son élevage se fait toute l’année, en circuit ouvert ou fermé dans plusieurs régions du monde. Sa croissance rapide et son adaptation à des écosystèmes variés de même que sa chair savoureuse font de lui un excellent candidat pour l’Aquaculture. La production d’Oreochromis niloticus se chiffre à 1,3 millions de tonnes, essentiellement en Chine et Philippines. La consommation moyenne mondiale passerait de 14 à 25 kg par habitant d’ici 2030.
Une production piscicole durable passe par la maîtrise de l’alevinage des espèces concernées afin de produire des quantités adéquates d'alevins performants d'âge connu, à moindre coût, à bonne potentialité de croissance à travers différents systèmes afin d’assurer l’autonomie de l’entreprise. Or les alevins mis en élevage sont d’une part, à potentiel réduit et d’autre part, coûte cher. Une bonne production d’alevins est nécessaire mais une bonne conduite de différentes étapes de l’élevage l’est encore plus pour en assurer la rentabilité.
La reproduction et l’alevinage d’O. niloticus sont bien maîtrisés et développés dans plusieurs systèmes notamment l’étang, les happas et cages, et les bassins et raceways. Le présent document traite des méthodes de production en masse d’alevins en étang et en happa suivies de la technique de gestion de ferme piscicole pour une rentabilité assurée de l’activité.
I- BIOLOGIE D’Oreochromis niloticus
1.1 Systématique
Les tilapias au sens large appartiennent à l'ordre des Perciformes, au sous-ordre des Labroidei et à la famille des Cichlidae. Ils comprennent les genres Tilapia au sens strict, Sarotherodon et Oreochromis dont Oreochromis niloticus (L).
1.2 Caractéristiques morphologiques
Oreochromis niloticus (Fig. 1) se reconnaît à ses rayures verticales sur la nageoire caudale ; une coloration grisâtre sur la même nageoire avec poitrine et flancs rosâtres; un corps, de forme variable mais jamais très allongé, plus ou moins comprimé et recouvert d'écailles cycloïdes ; la nageoire dorsale longue, à partie antérieure épineuse (17-18 épines) et à partie postérieure molle (12-14 rayons). La ligne latérale supérieure compte 21 à 24 écailles ; la latérale inférieure 14 à 18. Le dimorphisme sexuel, chez cette espèce, est très marqué. A l'état adulte, la papille génitale des mâles est protubérante en forme de cône et porte un pore urogénital à l'extrémité, alors que chez les femelles, elle est courte et présente une fente transversale en son milieu : c’est l’oviducte situé entre l’anus et l’orifice urétral. Le mâle se distingue en plus d’un liseré noir en bordure des nageoires dorsale et caudale.
Figure 1 : Tilapia nilotica |
Oreochromis niloticus présente une répartition originelle strictement africaine couvrant les bassins du Nil, du Tchad, du Niger, des Volta, du Sénégal et du Jourdain ainsi que les lacs du graben est-africain jusqu'au lac Tanganyika. Cette espèce a été largement répandue hors de sa zone d'origine pour compléter le peuplement des lacs naturels ou de barrages déficients ou pauvres en espèces planctonophages ainsi que pour développer la pisciculture. Elle est également cultivée dans les lacs, les fleuves et les piscicultures en Amérique, en Asie et en Europe.
1.4 Exigences écologiques et régime alimentaire
Oreochromis niloticus est une espèce adaptée à de larges variations des facteurs écologiques du milieu aquatique et colonisant des milieux extrêmement variés. C’est un poisson thermophile qui préfère les températures de 14 à 35°C et en conditions extrêmes, il peut supporter des températures de 7 à 41°C pendant plusieurs heures. Il supporte une salinité de 0,015 à 30 pour mille et un pH de 5 à 11.
Au point de vue concentration en oxygène dissous, cette espèce tolère à la fois de nets déficits et des sursaturations importantes. Il peut supporter plusieurs heures des teneurs en oxygène dissous de l’ordre de 0,1 PPM (part par million), ce qui est très faible.
Cette espèce est, en milieu naturel, mangeuse de phytoplancton, des algues bleues, du zooplancton, des sédiments riches en bactéries et en diatomées ainsi que des aliments artificiels dans les systèmes de pisciculture.
1.5 Croissance
En général, O. niloticus est connu pour sa croissance rapide et présente un indice de croissance plus performant que les autres espèces de tilapia. Sa durée de vie est relativement courte (4 à 7 ans), sa vitesse de croissance est extrêmement variable selon les milieux. Une autre grande caractéristique d’O. niloticus concerne son dimorphisme sexuel de croissance. A maturité, les individus mâles présentent une croissance nettement plus rapide que les femelles et atteignent une taille nettement supérieure. Ainsi, les mâles peuvent vivre longtemps avec une taille de 38 cm pour 2 kg alors que les femelles ne dépassent pas 28 cm pour 950 g.
1.6 Biologie de la reproduction
Oreochromis niloticus est un incubateur buccal. La femelle élève toujours ses petits dans la bouche, d’où le nom d’Oreochromis. La reproduction non contrôlée conduit à la production de population de poissons de petite taille, de faible valeur commerciale.
L'âge de reproduction des tilapias varie selon les conditions du milieu. En conditions optimales dans les lacs, O. niloticus commence à se reproduire vers l'âge de 2 à 3 ans alors qu'en conditions stressantes de pisciculture rurale mal conduite, il peut déjà se reproduire vers l'âge de 3 mois. La fécondité d'une femelle de tilapia est relativement faible et très variable en fonction du poids, des saisons et d'autres conditions du milieu. Une femelle de 100 g peut pondre 1200 ovules et celle de 700 g environ 3800 ovules. Après la fécondation par le mâle, les oeufs sont repris dans la bouche de la femelle pour l’incubation. En général, l'éclosion a lieu dans la bouche 4 à 5 jours après la fécondation. La taille des oeufs est de l'ordre de 2 à 3 mm. Les alevins sont protégés par leur mère et ne la quittent que lorsqu'ils ont 10 mm et qu'ils sont capables de rechercher leur nourriture.
En conditions optimales et à température de 25 à 28°C, une femelle d’O. niloticus peut se reproduire tous les 30 à 40 jours.
Lors de la reproduction, les mâles se réunissent sur une zone de nidification à faible profondeur et sur un substrat meuble (gravier, sable, argile). Chaque mâle porteur d’une coloration caractéristique délimite et défend un territoire et aménage un nid où il tentera d’attirer et de retenir une femelle mûre. Allant d’un territoire à l’autre, les femelles sont courtisées par des mâles successifs jusqu’au moment où, s’arrêtant au-dessus de la cuvette d’un nid, elles forment chacune un couple éphémère. Après une parade de synchronisation sexuelle, la femelle dépose un lot d’ovules, le mâle les féconde immédiatement en injectant son sperme sur les oeufs en suspension dans l’eau, puis la femelle se retourne et les prend dans la bouche pour les incuber. Finalement, la femelle s’éloigne et emporte en bouche les oeufs fécondés qu’elle va incuber dans des zones abritées.
II- TECHNIQUES ACTUELLES DE REPRODUCTION ET D'ALEVINAGE
La reproduction et l'alevinage de T. nilotica sont actuellement réalisés dans des systèmes d'élevage et selon des niveaux d'intensification très variables, dépendant des conditions topographiques, physico-chimiques, et socio-économiques de la région. Les différentes techniques utilisées jusqu'à présent sont présentées selon le milieu dans lequel elles sont développées. Seules les techniques de production d’alevins dans les étangs et dans les happas de pisciculture sont présentés dans le présent document.
2.1. Reproduction et alevinage en étangs
2.1.1. Rappel général sur les étangs de pisciculture
L'étang de pisciculture est une pièce d'eau artificielle peu profonde, de dimension variable, qui dépend de l'homme qui l'assèche, la remplit et l'aménage selon sa volonté pour l'élevage contrôlé du poisson. Toutefois, toute pièce d'eau existante ne convient pas toujours à la pisciculture, car celle-ci doit répondre à un certain nombre de critères.
2.1.1.1. Importance du choix du site
Trois critères fondamentaux sont à prendre en considération: la disponibilité en eau et sa qualité, la nature et la topographie du terrain ainsi que les facteurs socio-économiques de la région.
Disponibilité en eau
Il est en effet nécessaire de disposer toute l'année d'une quantité d'eau suffisante pour remplir les étangs et compenser les pertes par suintements, infiltration et évaporation. En régions tropicales, l'évaporation peut atteindre 2,5 cm par jour, ce qui nécessite un débit de 3 litres/seconde à l'hectare pour la seule compensation de l'évaporation. La quantité d'eau minimale requise pour un établissement piscicole est également fonction de l'intensification de l'élevage. Ainsi on peut admettre qu’il faut disposer d’un débit minimum de 10 litres/seconde par hectare d’étang pour être sûr de n’avoir pas de difficultés dans l’alimentation en eau. Ceci nous amène au problème de la qualité de l'eau qui ne doit pas être polluée (attention aux prises d'eau à l'aval des villes et villages).
Dans la plupart des cas, la tolérance du tilapia est très élevée, la survie des poissons étant observée aux valeurs extrêmes signalées. La reproduction et la croissance nécessitent par contre des conditions plus strictes. Ainsi, les eaux claires, de pH neutre ou légèrement alcalin peu chargées en azote ammoniacal, sont les plus aptes à la pisciculture.
Choix du terrain
La topographie originelle du terrain doit présenter une certaine pente (2-3%) pour équilibrer les déblais et remblais et permettre le remplissage et la mise à sec des étangs selon les besoins du pisciculteur. L'alimentation en eau et la vidange de l'étang par simple gravité est indispensable. Le remplissage de l'étang par pompage est fortement déconseillé et ne peut être envisagé que pour de petites superficies et de façon ponctuelle car il augmente les coûts de production.
La nature du terrain sera de préférence argileuse pour limiter les infiltrations d'eau. A la limite, on construira des digues avec des noyaux d'argile selon les techniques classiques. En aucun cas, on ne construira des étangs dans des zones très caillouteuses et/ou très sablonneuses.
Facteurs socio-économiques
Ces facteurs sont importants lors du choix de la zone d'implantation d'une pisciculture.
- Y-a-t-il un marché pour son produit et quelles sont la nature, la taille et la situation de ce marché?
- Y-a-t-il des industries agricoles à proximité et les sous-produits de ces industries peuvent-ils être utilisés comme fertilisants et/ou comme nourriture pour les poissons?
De même, la surface de la pisciculture et la quantité de production d'alevins à produire doivent être fonction de l'économie agricole locale.
Bien que ces considérations semblent évidentes, il est surprenant de voir à quel point les facteurs économiques ont souvent été et sont toujours peu ou non considérés lors de l'installation d'une ferme piscicole.
2.1.1.2. Caractéristiques requises pour les étangs
La construction de digues, ou le creusement de l'assiette de l'étang sera effectué de telle sorte que la profondeur minimale soit toujours supérieure à 0,5 m afin d'éviter l'envahissement par la végétation. Des profondeurs maximales de 1,5 à 2 m au niveau du moine permettront aux poissons d'échapper aux effets nocifs des variations thermiques sans nécessiter pour autant la construction de digues trop importantes.
En ce qui concerne les étangs de dérivation, il est impératif que l'étang puisse se remplir et se vider en toutes saisons par simple gravité. L’on doit pour cela mettre en place le meilleur dispositif de vidange qui est un « moine ».
Elle doit être aussi protégée contre l'érosion en la plantant de graminées rampantes.
2.1.2. Méthode de production d'alevins en étang
2.1.2.1. Elevage par classes d'âges séparées
Cette méthode consiste à réaliser l'alevinage et le grossissement dans plusieurs étangs. Deux techniques sont généralement utilisées: soit l'emploi d'un étang de reproduction servant à la fois d'étang-frayère et d'alevinage (jusqu'à l'obtention de poissons d'environ 30 g), soit l'emploi d'un étang de reproduction et de premier alevinage (jusqu'à l'obtention d'alevins de 0,5 à quelques g.) suivi de l'utilisation d'un étang de prégrossissement visant la production de "fingerlings" (gros alevins de 20 à 30 g).
Quelle que soit la technique utilisée, les étangs de reproduction et d'alevinage sont installés en dérivation, afin d'éviter l'introduction d'espèces étrangères indésirables (T. zillii) et particulièrement de prédateurs tels que Hemichromis fasciatus, H. bimaculatus, Clarias spp, etc.
Afin de maintenir une population standard de géniteurs de référence et éviter ainsi une dérive génétique, il faut disposer d’un nombre minimum de géniteurs effectifs de 250-300 individus dans le cas d'une pisciculture de taille modérée.
a. Etangs de reproduction
Surface des étangs et densité de mise en charge
Les étangs de reproduction sont légèrement grands, de l'ordre de quelques ares. En étang de 4 ares, la mise en charge est effectuée à l'aide de 200 femelles (poids moyen = 100 à 120 g) et de 70 mâles (P.M = 120 à 150 g), soit une densité de 0,7 géniteurs/m2 et un rapport des sexes femelle/mâle de 3:1. Cette densité est à retenir lorsqu'un apport journalier de nourriture de qualité est assuré (25% de farine de poisson et 75% de son de riz à raison de 2% de la biomasse par jour).
Méthodes et résultats de production
Afin d'obtenir des reproductions synchronisées, les étangs de ponte doivent être mis en charge avec des géniteurs T. nilotica femelles se trouvant à un stade de maturation avancée. La température de l'eau de l'étang doit être supérieure à 21°C pour permettre le déroulement normal de la reproduction.
Deux techniques de récolte sont généralement utilisées, soit la vidange régulière des étangs à intervalle de 60 jours, de façon à limiter la fréquence des pontes et séparation des géniteurs et du jeune frai à l'aide de filets de mailles appropriées, soit la récolte par sennage de l'étang avec un filet non plombé à petites mailles (6 mm) permettant de récolter tous les alevins d'un poids moyen supérieur à 0,5 g. L'exploitation débute 45 jours après la mise en charge des géniteurs et se poursuit à la fréquence d'une récolte tous les 15 jours.
Dans ces conditions, on peut s'attendre à une production d'alevins de l'ordre de 10 à 100 ind/m2/mois lors de vidange mensuelle de l'étang, voir de 20 à 200 ind/m2/mois par sennage bihebdomadaire.
b. Etangs de prégrossissement
Dans la mesure où on dispose de suffisamment d'étangs et de main d'oeuvre bon marché, il sera préférable de produire les fingerlings en deux étapes à savoir, en étangs de prégrossissement (2 ares) jusqu'à un poids moyen de l'ordre de 5 g, puis en étangs de grossissements (4 ares) jusqu'à un poids moyen de 20 à 25 g. Les densités de mise en charge seront adaptées en fonction des aliments distribués. En cas de disponibilité d'aliments composés, des mises en charge de 50 jeunes alevins/m2 devraient conduire, après un mois, à une bonne récolte (80%) d'alevins prégrossis de l'ordre de 5 g. Une remise en charge avec des alevins prégrossis dans de plus grands étangs (4 ares) à une densité de 20 ind/m2 devrait conduire, après 2 mois, à une récolte importante (90%) d'alevins d'environ trente grammes tout à fait aptes à la mise en charge dans les grands étangs de production de poissons pour la consommation.
c. Production d'alevins monosexes mâles
La production d’O. niloticus de consommation est de plus en plus souvent réalisée à partir de population monosexe mâle, de façon à éviter les reproductions incontrôlées et indésirables et à obtenir de meilleurs rendements, étant donné que les mâles grandissent plus rapidement que les femelles.
Quatre techniques sont habituellement utilisées pour produire des populations monosexes mâles. Il s’agit de :
- Séparation des sexes
Elle consiste à sexer les alevins ayant atteint un stade sexuellement différencié par examen de la papille urogénitale. Cette méthode est toutefois laborieuse et des erreurs de sexage sont régulièrement commises lorsqu'on travaille sur des quantités importantes de poissons.
- Hybridations interspécifiques
L'hybridation de plusieurs espèces de tilapia (par exemple: O. niloticus
× O. aureus
) conduit à une progéniture caractérisée par une proportion élevée (90 à 100%) de mâles. Le principal désavantage de cette méthode est la nécessité de maintenir une souche pure de géniteurs.
- Inversion thermique du sexe
La technique d'inversion thermique du sexe à 36 °C sur des embryons ou des alevins, permet d’obtenir plus de 90% d’individus mâles. La production d'alevins monosexes doit être réalisée en bouteille de Zoug ou en aquarium. Ce traitement doit être appliqué sur les oeufs fraîchement fécondés jusqu’à l'éclosion (2-3 jours) ou sur des alevins pendant 1 mois.
- Inversion hormonale du sexe
La technique d'inversion hormonale du sexe à partir d’androgène, permet d’obtenir des individus à phénotype-génotype opposé. La production d'alevins monosexes doit être réalisée en conditions intensives en happas, en cages ou en bassins pour que les alevins ne puissent absorber d'autres nourritures que l'aliment artificiel dans lequel on a incorporé de la méthyltestostérone (60 mg/kg). Ce traitement doit être appliqué depuis l'éclosion jusqu'à l'âge de 3 à 4 semaines.
2.1.2.2. Fertilisation minérale et organique
Quel que soit le mode de production d'alevins, la fertilisation de l'étang se révèle de première importance, principalement chez T. nilotica.
Elevés à faible densité, les tilapias peuvent satisfaire leurs besoins nutritionnels à partir de nourriture naturelle. L'augmentation de production de cette nourriture naturelle, par fertilisation minérale ou organique, couplée à une augmentation de la densité d'élevage, s'accompagne généralement d'une élévation considérable des rendements.
Dans les étangs de ponte de T. nilotica, l’on peut effectuer une fertilisation de démarrage de 2000 kg/ha d'excréments sèches de poulet et de 100 kg/ha d'engrais inorganiques (N:P:K:16-20-0), suivie d'une fertilisation hebdomadaire de 3000 kg/ha/mois d'excréments de poulet et de 100 kg/ha/mois d'engrais inorganiques. En étang de prégrossissement recevant entre 15 et 23 alevins/m2, les doses d'engrais organiques et inorganiques sont portées respectivement à 2500 kg/ha/mois et 250 kg/ha/mois. Au Bénin la fertilisation est effectuée à l'aide de fumier de porc, à raison de 4500 à 6000 kg de matière sèche/ha/mois en étangs de reproduction et de 4500 kg/ha/mois en étang de prégrossissement à une densité de 40 alevins/m2.
2.1.2.3. Alimentation artificielle et complémentaire des géniteurs et des alevins
Bien qu'étant parmi les poissons les plus largement cultivés dans le monde du moins en régions intertropicales, les tilapias ont reçu peu d'attention quant à leurs besoins nutritionnels. L'intensification de l'élevage des tilapias, aussi bien en production d'alevins qu’en grossissement des "fingerlings", doit inévitablement passer par la pratique d'un nourrissage régulier et de qualité appropriée.
Alimentation en étangs de ponte et de prégrossissement
En étangs de ponte, l'alimentation visera essentiellement à nourrir les géniteurs, la productivité naturelle en plancton étant normalement suffisante pour couvrir les besoins des larves et des jeunes alevins. Toutefois, dès qu'apparaissent les premiers alevins, un supplément de nourriture peut être distribué plusieurs fois par jour.
Le taux d'alimentation des géniteurs sera calculé, soit en fonction de la biomasse de ceux-ci (2,5 à 6%), soit selon la demande. L'alimentation est habituellement constituée d'un mélange pulvérulent plus ou moins élaboré ou de granulés (4 mm de diamètre).
En étangs de prégrossissement, la nourriture sera également distribuée sous forme pulvérulente, en fonction de la biomasse et de la taille des alevins déversés. Le calcul des rations quotidiennes est basé sur le principe suivant :
-10% du poids vif si le poids moyen est inférieur à 5g (6 distributions/jour) ;
- 7,5% du poids vif si le poids moyen est compris entre 5 et 10g (4 distributions/jour) ;
- 5% du poids vif si le poids moyen est supérieur à 10g (4 distributions/jour).
L'efficacité d'un aliment est exprimée par la valeur du coefficient de conversion alimentaire, appelé également quotient nutritif (QN) et défini comme le rapport entre la quantité d'aliment distribué et le gain en poids vif des poissons.
2.1.3. Prédations, maladies, vols en étang
La production escomptée au moment de la vidange ou des récoltes intermédiaires peut être réduite par la présence d'espèces indésirables jouant un rôle direct en tant que prédateurs ou indirect en tant que concurrents alimentaires (poissons prédateurs, batraciens, oiseaux piscivores et insectes aquatiques). Des mortalités importantes peuvent également être observées en cas de pollution ou d'épidémies provoquées par certains agents pathogènes (bactéries, virus, parasites protozoaires et métazoaires).
Le pisciculteur veillera également à informer de sa présence les personnes utilisant l'eau du ruisseau en amont de sa pisciculture afin d'éviter les mortalités massives par des pesticides et notamment insecticides. Il faudra également veiller à écarter de la pisciculture les utilisateurs d'ichtyo-toxiques (roténone).
Les adultes sont généralement les plus convoités, soit directement comme poisson de consommation, soit comme reproducteur. Les vols les plus fréquents sont toutefois réalisés par vidange nocturne, par pêche au filet épervier, à l'épuisette ou aux lignes de fond. La disposition de branchages dans l'étang, le long des berges, ou de piquets reliés par des barbelés, permet de limiter fortement ces captures indésirables. D'une façon générale, l'installation des étangs à proximité des habitations est recommandée.